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letra de 2012 - spoke orkestra

les femmes étaient enceintes pendant quatorze mois
les hommes p-ssaient leur temps sous la douche
avec ce sentiment d’être salis définitivement
on sentait les odeurs des gens en les regardant

il pleuvait tous les jours pendant deux heures
le soleil était dur
les dessins des enfants n’étaient plus les mêmes
il fallait les forcer pour qu’ils suivent leurs parents
on devait faire la queue longtemps pour acheter accessoires
jouets s-xuels, kits de survie, les filières spécialisées : supprimées

les femmes refusaient d’aller travailler
les hommes rechignaient à sortir
ensemble, ils poussaient leurs voitures aux réservoirs pleins pour avoir quelque chose à faire
en 2012, on avait des bracelets électroniques et de la kétamine en vente libre
tous les indicateurs étaient dans le rouge
plus personne ne commentait le cours du jour
il fallait pas déconner parce qu’après on allait en désintox
l’auxiliaire être retiré des grammaires

on allait partout avec un pistolet dans la ceinture du pantalon ou rangé sous l’aisselle
en 2012 la vie était plus belle

les mots “p-sse”, “échec”, “régression”, bannis des dictionnaires
c’est pas qu’on comprenait pas, c’est le contraire, on comprenait tout
très très bien
très bonne compréhension de la situation mais confusion sur le vocabulaire

problèmes de syntaxe
les anciens sous-marins nucléaires servaient de centre de loisirs ou de grandes salles de concerts, interdit de parler à voix haute à un tiers
le chuchotement était omniprésent
les nouveaux mots valaient une fortune quelques mois à peine après qu’ils avaient été mis en circulation

toutes les bibliothèques disposaient d’un volume unique, toujours le même
sans t-tre, sans tranche, des milliers de pages blanches
2012
et la mode avait changé

les filles épilées p-ssaient pour être du matériel de mauvaise qualité
les gars musclés sentaient que le temps des salles de sport pleines à craquer c’était fini
les bâtiments étaient toujours équipés de portiques et d’alarmes incendie
alors qu’il n’y avait plus rien à voler et aucun feu à signaler
on mangeait ce qu’on trouvait en se fiant à la couleur des aliments
les escrocs ne s’en tiraient pas mieux que les honnêtes gens

2012
les volets ne s’ouvrent plus que le dimanche
les lampadaires n’éclairent les ruelles que de 22h à minuit
on ne compte plus qu’une épicerie au kilomètre carré
une grande surface pour 30 000 résidents
il est devenu absolument interdit de consommer du poisson
une agglomération : une école
une agglomération : une pharmacie
cinq agglomérations : un cabinet médical
le marché noir ne fait plus que dans les pièces administratives
il est plus facile d’obtenir une vraie carte de séjour qu’un faux ticket de bus
les langues se sont déliées, décomplexées
des gens partent un matin, puis ne reviennent jamais
les plus chanceux ont quelques pièces en poche et peuvent acquérir le vaccin de la semaine, la semaine dernière c’était la peste, cette semaine on ne sait pas encore
mais le vaccin, lui, est déjà en vente
dans un souci d’efficacité, la milice de proximité loge à même la vermine : chez l’habitant
dans un souci d’hygiène, se moucher en public est p-ssible d’une amende forfaitaire
et le chant des nez plein d’humus dans les salles d’attente des bars
une rue, une avenue, une allée
a chaque fois, un bar
chacun est tenu d’avoir toujours en sa possession une livre de beurre et l’argent que cela coûte, ancienne superst-tion populaire
avoir un enfant ? rien de plus stupide
chaque motte de terre a été soigneus-m-nt remplacée par un carré de béton
les rats des égouts portent le dos nu, peau violacée sans poil
endémie mystérieuse
2012

- spoke orkestra

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